Les plus de 65 ans représentent en 2022 plus de 20% de la population française*.  Les prévisions pour 2060 annoncent qu’un Français sur trois aura dépassé les 60 ans. L’espérance de vie, qui s’allonge, permet aux seniors de profiter pleinement de cette troisième période de vie. S’il semble que la retraite nous offre plus de temps libre, rapidement le planning se trouve surchargé. Bénévolat, garde de petits-enfants, activités culturelles et sportives, ...  Les temps de repos et de détente sont souvent négligés.Le Père Maximilien, dans son livre Éloge spirituel du repos, explique les risques de cette hyperactivité.

*Source : Insee, estimations de population (données provisoires arrêtées à fin 2021).

Bonjour P. Maximilien, pouvez-vous vous présenter brièvement ?

Chanoine de l’abbaye de Lagrasse dans l’Aude, je suis religieux depuis 30 ans et prêtre depuis 1998. Notre communauté nous propose une vie contemplative et une vie active mais mon activité a été largement ralentie en 2014, suite à l’apparition d’une tumeur au cerveau. Contraint à prendre un repos forcé après l’opération, j’ai été peu à peu amené à réfléchir sur la thématique du repos, laquelle traverse l’histoire des hommes depuis la Bible jusqu’à aujourd’hui.

Vous avez récemment écrit un livre sur le repos. Pouvez-vous nous expliquer la genèse de cet ouvrage ? Est-ce uniquement votre maladie ou y a-t-il d’autres raisons ?

Certes ma maladie n’a pas été étrangère à l’écriture de ce livre !... Mais au fil de ma convalescence, j’ai été de plus en plus attentif à ce thème. J’ai vu qu’il était assez oublié à notre époque où « le temps c’est de l’argent » et où les activités se multiplient et nous submergent. Nous ne vivons donc plus de repos authentique. Celui-ci est une vraie restauration et un accomplissement de la personne. Or, de nos jours, un tel repos est pratiquement difficile …

Le titre de l’ouvrage Éloge spirituel du repos tend à lier la détente à la spiritualité. Pouvez-vous nous en dire plus ?

La détente est une forme de repos qui n’est pas exclusive. Le repos est une réalité beaucoup plus vaste, embrassant des activités variées. Le repos peut être le sommeil, la lecture, la musique, le sport, les échanges de l’amitié, la convivialité, ...

Le repos nous met face à nous-même, nous permet finalement de prendre un peu de hauteur au-dessus des préoccupations, des soucis et des fatigues du moment. Il nous permet alors de nous recentrer sur nous-mêmes. C’est une porte d’entrée vers la vie spirituelle, la vie avec Dieu qui est le Dieu intérieur.

Le repos vous semble-t-il nécessaire pour bien vieillir ?

Ce n’est pas pour rien que le Ciel est défini comme le repos éternel. Nous sommes tous destinés au Ciel, à rencontrer le Seigneur, à nous reposer en Lui. Ce repos sera l’activité suprême, sans déclin. Pour se préparer à ce repos éternel, qui sera un temps de joie et d’intense activité, il faut commencer dès maintenant : repos physique, repos du cœur, des affections, .... A nous d’apprendre à ne plus être sous le joug des multiples travaux ou devoirs imposés par la société de consommation !

Ce repos est une bonne façon de vivre et de vieillir. Ne pas assumer notre retraite, notre vieillesse de façon oisive ou paresseuse, mais la remplir d’une activité saine qui va nous humaniser. Alors que l’on commence à avancer en âge, dans le temps, dans notre existence, on se rend compte que l’on a encore besoin d’être humanisé. Bien souvent, jusqu’à maintenant, on s’est laissé façonner par les évènements et on ne les a pas délibérément choisis. Le repos doit être une activité choisie, voulue.

Dans la Bible, Dieu se repose le septième jour. Ce n’est pas un jour d’inactivité. C’est au contraire le sommet de son activité après les six jours de création.

Quel bénéfice spirituel peut-on attendre d’une âme reposée ?

L’âme reposée est davantage « branchée » sur Dieu et plus à l’écoute d’elle-même. Elle se voit comme aimée de Dieu, attendue. Elle redécouvre sa véritable identité qui était bien souvent surchargée et déformée par les différentes professions, devoirs et masques que la vie sociale lui a imposés. En fait, c’est une sorte de retour à l’identité originelle, à notre identité baptismale d’Enfant de Dieu. Nous sommes débarrassés de ce qui a accompagné notre travail et nos responsabilités en nous encombrant. C’est un bénéfice important pour nous. Notre personne se simplifie ; elle a davantage de prise sur le réel ; elle découvre mieux la contemplation ; elle s’ouvre à l’autre qui est une personne et non pas un concurrent, ni un client, ni un adversaire !

Dernière question : où peut-on se procurer votre ouvrage ?

Il est publié aux éditions Artège.

Vous pouvez le trouver en librairie ou le commander ici

Souhaiteriez-vous aborder un dernier point sur lequel je ne vous aurais pas interrogé ?

J’aime bien parler du repos de Jésus car … Jésus sait se reposer ! C’est vraiment important de le savoir, de le comprendre. Jésus se repose dans la barque, au puits de Jacob avant de rencontrer la Samaritaine, à Béthanie chez ses amis. Le Christ nous fait voir l’importance du repos et nous déculpabilise de ne pas travailler. Le repos, le Christ l’a choisi et l’a commandé à ses apôtres, à deux reprises. Notamment au lac de Tibériade quand il leur dit :

« Venez à l’écart et reposez-vous un peu. »

Ces phrases du Christ traversent le temps et informent notre quotidien d’aujourd’hui.

 Non, Il ne faut pas avoir de scrupules à nous reposer. Ce n’est pas de la paresse. Car être paresseux, c’est faire quelque chose que nous n’avons pas à faire maintenant. Or le repos, lui, est une nécessité : il nous aide à rencontrer le Seigneur et nous retrouver nous-mêmes.

Reposons-nous, c’est un commandement du Christ !

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